IBRAHIMA KEBE : LES SCENES DE LA VIE

Ibrahima KEBE a exposé du 28 juin au 07 Septembre 2011 à la Raw Material Company ses « nouvelles œuvres : peintures et dessins ». La première en solo depuis 10 ans, cette exposition a été l'occasion de mettre en scène sur 20 toiles et 25 dessins en couleur et noire et blanc, le vécu quotidien des protagonistes.

Ibrahima Kébé, “Conseil de famille” (familly meeting), 2011.
Acrylic on canvas, 46x60cm.
Photo by Mamadou Gomis.
Sur ses toiles, Ibrahima KEBE représente toutes les composantes de la société. Du vendeur de volaille au joueur de balafon, en passant par le prétendant transit d’amour et le manifestant bardé de rouge. La figure la plus présente dans l’œuvre de cet artiste de 61ans, est sans nul doute la femme. Elle est partout, peinte  sous différentes coutures. Elle est coquette, convoitée. C’est la belle de nuit. Elle est dans son foyer, mère et épouse, entourée de sa ribambelle d’enfants, triturée par la quête de la dépense quotidienne. Elle est sur le chemin du marché, c’est la vendeuse de « acara », la mère fille. Ibrahima KEBE n’a de cesse de célébrer la femme.
S’il expose la vie de tous les jours et met en situation différents personnages, son art n’en est pas pour autant figuratif. Il ne fait pas de reproduction de la vie quotidienne. Il se contente de coucher sur papier les sensations et impressions qu’elle lui inspire. Il relate des joies, des peines, ces épiphanies qui font le charme et la couleur de Dakar. Ce sont ses « sénégalaiseries », la série de dessins « les chats », vivants, ronronnant, se chamaillant, « discutant » sortis de son souvenir et de l’imaginaire.  Au moyen de la toile, du papier et de l’acrylique, l’artiste ironise et provoque. Il invite à rire de la vie. La toile « 19 mars » l’illustre bien, ces personnages agglutinés, entassés, vêtus de chemises, d’écharpes, de casquettes rouges ont le visage grave dissimulé derrière de grosses lunettes noires. C’est un clin d’œil fort aux manifestations qui ont marqué ce jour. « Les lutteurs » eux, ont un corps à corps approximatif sous la harangue de leurs supporters surexcités. En mettant l’accent sur les couleurs terre, Ibrahima KEBE peint le Dakar d’hier et d’aujourd’hui, avec ses dahras et ses anciens combattants, les « ndawrabine » qui continuent de rythmer les nuits de la capitale.
Par sa maîtrise du dessin et du graphisme, Ibrahima KEBE joue à loisir avec ses protagonistes. Il leur allonge le coup, leur atrophie le bras. Il distend les formes, alourdit les traits de ses personnages. Il exagère le bleu, le rouge, l’oranger. Sous son pinceau expert, ces hommes et ces femmes sont vivants, exubérants. Avec eux, Ibrahima accroche, il interpelle. Il met à nu et critique la rue publique. Avec ses bleus gras, atemporels et plein d’espoirs, à l’heure où la tendance est au retour à la terre, et à l’authenticité, l’expression franche et fraîche d’Ibrahima KEBE est en soi un appel, une invite à célébrer la vie.
 Contrairement à de nombreux artistes, Ibrahima KEBE n’a pas recourt à d’autres techniques. Il est constant dans son expression et dans les matériaux qu’il utilise, les mêmes depuis des décennies. « Je n’ai pas besoin de changer mon expression, dit-il. Pourquoi changer ? » KEBE considère qu’il doit préserver son originalité pour éviter les nombreux travers de l’art nouveau qu’il attribue à un manque d’inspiration.
Ibrahima KEBE a été formé à l’école des Beaux arts de Dakar de 1976 à 1979. Son œuvre couvre trois décennies de pratique. Il est connu dans les milieux des arts plastiques et a souvent exposé au Sénégal et à l’étranger. Il a ainsi exposé au 14ème Salon International d’Art Contemporain à Libramont en Belgique, dans le cadre du Bicentenaire de la Révolution Française, en Suisse, au Lichtenstein etc. Ses œuvres sont prisées par les collectionneurs privés  et figurent dans la collection de l’état du Sénégal. Il intervient également en tant que éducateur artistique dans de nombreuses écoles et instituts au Sénégal et à l’étranger. Les amateurs peuvent retrouver l’artiste au village des arts de Dakar, pour visiter ou revisiter son oeuvre.
                                                                                                                 Ndeye Débo Seck

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