LA POUPONNIERE DES SŒURS FRANCISCAINES DE MEDINA

article écrit en août 2009 

Située à la Médina, derrière le commissariat de police,  la pouponnière des Sœurs Franciscaines ne diffère pas beaucoup des bâtisses qui l’entourent. Le grincement du portail métallique de couleur grise vient rompre le silence qui règne en ce lieu paisible.  Une fois franchie l’entrée, une petite cour donne accès à un hall où on peut voir de petites sculptures de la Sainte Vierge  et du Christ, de petits tableaux accrochés aux murs figurant Jésus-Christ ou l’immaculée conception, une photographie du Pape Jean Paul II, souvenir de sa visite  au Sénégal de Février 1991. Au niveau du hall deux jeunes filles sobrement vêtues font office de standardistes, elles accueillent les visiteurs et répondent au téléphone ;  des chaises sont aussi installées pour leur permettre de patienter avant d’accéder au bureau de la directrice religieuse attenant au hall. Une fois franchie la porte vitrée du hall,  le visiteur est enchanté par le gazouillis des oiseaux qui ont élu domicile dans les grands arbres qui ornent la cour principale. L’escalier qui mène au  premier étage donne sur  un couloir carrelé emplis déjà des cris des enfants qui se trouvent dans une salle au bout du couloir. Le long duquel on entrevoit les box avec de petits lits qui servent de dortoirs aux enfants.  Au bout du couloir, une barrière de protection empêche les enfants de 6 mois à 1 an de franchir le seuil de  la salle de jeu. A l’intérieur on est assailli par leurs cris intempestifs, mêlés à une musique douce, ils forment un joyeux tintamarre. On voit des enfants qui rampent, d’autres s’essaient à la marche et s’agrippent à la barrière pour fouler  cette zone  inconnue que représente pour eux le couloir. Une ambiance presque similaire règne au deuxième étage qui accueille les plus jeunes enfants, de un à six mois. Mais à ce niveau, les bébés sont tous couchés sur le dos ou sur le ventre, sur des tapis matelassés.  
Attenantes aux escaliers, à l’autre bout du couloir se trouve une cuisine, une infirmerie et une salle où sont conservées  les rations de nourriture.
Depuis sa fondation le 05 Aout 1955, la pouponnière a accueilli 4132 bébés. En 2008 les sœurs avaient recensés 3500 orphelins et cas sociaux, 102 enfants décédés, 512 petits pensionnaires du centre avaient fait l’objet de procédures d’adoption. Ils sont aujourd’hui près de 90 bouts de bois de Dieu dans cette structure administré  par  Sœur Augustina. La soixantaine bien sonnée, cette infirmière diplômée d’état, d’origine espagnole porte bien son âge dans sa petite robe Vichy bleu clair. Depuis 1973 elle est dévouée à la cause humanitaire ainsi elle a fait de nombreux pays africains.
Affiliée à la congrégation des Sœurs Franciscaines, la structure fonctionne  en interne, elle est aidée en cela par des dons de personnes de bonne volonté et  une petite subvention de l’état. A propos de l’utilisation de ces ressources, Sœur Augustina informe que ses ressources servent à l’entretien des enfants, mais aussi à payer le personnel et les factures, notamment l’électricité, la pouponnière possède 6 machines dont 3 industriels.
Pour bien s’occuper de ces petits bout-de-chou, la structure s’est dotée de plusieurs services animés par un personnel qualifié et dévoué à la cause des enfants. Sœur Ilda, infirmière  diplômée d’état d’origine suisse est chargée des soins médicaux, elle affirme « je prodigue des soins  aux bébés de 0 à 3 mois, je veille à leur bien-être avec affection et tendresse ». Elle supervise aussi le travail des 6 monitrices. Sœur Elvira originaire du Japon est en charge  de la gestion des rations de nourriture.  Les monitrices ont pour mission essentielle d’encadrer les 42 nounous réparties dans les deux étages.  Louise est monitrice, elle travaille de 8 heures à 19 heures, ainsi elle surveille le travail des nounous : «  il s’agit de mener les bébés au bain, les faire manger, jouer avec eux » elle s’occupe des prématurés ».
Lors de notre visite, nous avons trouvés des jeunes filles qui de manière bénévole viennent régulièrement pour prodiguer des soins aux enfants.
Les enfants pensionnaires de la pouponnière le sont en principe provisoirement. En effet Sœur Augustina explique que la plupart des enfants sont orphelins de mère, ainsi ils sont confiés par leurs pères à qui il est demandé une participation symbolique de 10 000 francs. La structure accueille aussi des cas sociaux le temps que leurs parents aient les moyens de les reprendre. Mr Ba a confié son fils de 2 mois aux sœurs car il est convaincu qu’il bénéficiera des meilleurs soins. « Sa mère est décédée à la naissance et je n’ai personne pour s’en occuper, aussi je le fais garder ici, avec l’intention de le reprendre dans une année ». Il ajoute qu’aucune charge ne lui incombe durant cette période, «  même ses habits elles me l’ont rendus ». 
Pour les enfants abandonnés, l’objectif est de leur trouver des familles d’accueil. Cependant, cette procédure essentiellement judiciaire et policière n’incombe pas à l’administration de la structure. Mais la pouponnière travaille en accord avec le tribunal départemental de Dakar et le ministère de la famille.
Les jeunes filles qui grandissent à la pouponnière bénéficient d’une formation pratique, et d’un enseignement théorique du niveau de la 4ème. Dans cette structure appelée Foyer Maria Goretti il leur est inculqué des notions d’anatomie et de physiologie, des cours de français, d’anglais, de calcul, d’économie, d’histoire, de catéchèse et de lecture…  Elles sont  aussi  initiées à la coupe et à la couture, la broderie, la cuisine, au tricotage, à la lingerie, et surtout la puériculture. Ainsi elles alternent une semaine en classe et une semaine de travail à la pouponnière. Le foyer reçoit aussi des jeunes filles de l’extérieur. Après la formation de 2 ans les jeunes filles peuvent choisir de rester ou de travailler dans des familles selon leurs compétences. Les garçons sont pris en charges par les Sœurs jusqu’au collège, après ils sont confiés à des prêtres pour éventuellement poursuivre des études supérieures.
La pouponnière des Sœurs franciscaines a toujours œuvré pour l’accueil des enfants abandonnés, orphelins ou nécessiteux. Au vu de tout le travail accompli depuis sa fondation, et du peu de moyens dont elles disposent, il est aujourd’hui plus que jamais, impérieux que les autorités leur apportent soutien et assistance. De même un appel est lancé pour qu’il y ait d’avantage de personnes de bonne volonté  pour l’octroi de dons qui contribuent à la prise en charge de la petite enfance. Ce qui pourrait contribuer à enrayer  le phénomène de l’infanticide qui atteint des proportions inquiétantes.
                             Ndèye Débo Seck

Commentaires

Articles les plus consultés